Pascaline

Une pascaline, signée par Pascal en 1652, au musée des arts et métiers du Conservatoire national des arts et métiers à Paris.

La pascaline, initialement dénommée machine d’arithmétique puis roue pascaline[1], est une calculatrice mécanique inventée par Blaise Pascal et considérée comme la première machine à calculer[2],[3].

C'est en 1642, à l'âge de dix-neuf ans, qu'il en conçut l’idée[4], voulant soulager la tâche de son père qui venait d’être nommé premier président à la Cour des aides de Normandie, à Rouen, par le cardinal de Richelieu et qui devait remettre en ordre les recettes fiscales de cette province[5] ; elle permettait d’additionner et de soustraire deux nombres d'une façon directe et de faire des multiplications et des divisions par répétitions.

C'est en 1645, après trois ans de recherches et cinquante prototypes, que Pascal présenta sa première machine en la dédiant au chancelier de France, Pierre Séguier[6]. Il construisit une vingtaine de pascalines dans la décennie suivante, souvent en les perfectionnant ; huit de ces machines ont survécu jusqu’à nos jours, une neuvième fut assemblée au XVIIIe siècle avec des pièces restantes[7]. Un privilège royal, promulgué par Louis XIV[8], lui donna l'exclusivité de la production de machines à calculer en France[9],[10].

La pascaline fut la seule machine à calculer opérationnelle au XVIIe siècle[11] car elle utilisait des pignons lanternes, empruntés aux machines de force (moulins à eau, horloges de clocher) que Pascal avait adaptés et miniaturisés pour sa machine. Ces pignons lanternes permettaient de résister aux mouvements brusques et irréguliers de la main de l'opérateur[12] tout en ajoutant très peu de friction à l'ensemble du mécanisme[13]. De plus, Pascal inventa un reporteur : le sautoir, qui isolait chaque chiffre car il n'était lancé d'un chiffre à l'autre que pour ajouter une unité de retenue à la roue suivante, créant ainsi une progression des retenues en cascade[14]. Grâce au sautoir, la pascaline n’était pas limitée en capacité : « pour la facilité de ce [...] mouvement [...] il est aussi facile de faire mouvoir mille et dix mille roues tout à la fois, si elles y étaient [...] que d'en faire mouvoir une seule »[15].

À partir de 1649, Pascal cherche à réduire le coût de fabrication de sa machine, qui la rend inaccessible au grand public. En 1654, toutefois, il abandonne le projet, se retirant définitivement du monde de la science pour se consacrer à l'étude de la philosophie et à la religion. Il a trente et un ans.

L'introduction de la pascaline marque le commencement du développement du calcul mécanique en Europe, puis, à partir du milieu du XIXe siècle, dans le monde entier. Ce développement, qui passera des machines à calculer aux calculatrices électriques et électroniques des siècles suivants, culminera avec l'invention du microprocesseur par Intel en 1971[16],[17]. Mais c'est aussi Charles Babbage qui concevra sa machine analytique de 1834 à 1837, une machine à calculer programmable qui est l'ancêtre des ordinateurs des années 1940[18], cela en associant les inventions de Blaise Pascal et de Jacquard, commandant, avec des instructions écrites sur des cartes perforées, un des descendants de la pascaline, la première machine qui suppléa l'intelligence de l'homme[19].

La pascaline fut à l'origine de beaucoup de machines et d'inventions clés de cette industrie. En effet, c'est en cherchant à y ajouter une interface de multiplication automatique que Leibniz inventa son fameux cylindre cannelé (1671)[20] ; Thomas de Colmar s'inspira des travaux de Pascal et de Leibniz quand il conçut son arithmomètre qui, après trente ans de développement, deviendra, en 1851, la première machine à calculer commercialisée au monde ; Dorr E. Felt substitua un clavier à touches aux roues d'entrée de la pascaline pour son comptomètre, qui sera la première machine à calculer utilisant un clavier et, soixante-dix ans plus tard, la première machine à calculer à devenir électronique. La pascaline fut aussi souvent améliorée avec les machines de Boistissandeau en 1730, mais surtout avec les machines de Didier Roth[21] vers 1840, et enfin avec des machines portables jusqu'à l'avènement des premières calculatrices électroniques.

  1. Guy Mourlevat, p. 20 (1988)
  2. Maurice d'Ocagne p. 245 (1893)
  3. Jean Marguin, p. 48 (1994) Citant René Taton (1963)
  4. Preface aux Pensées, intitulée : Sa vie, par sa sœur Mme  Périer, p. VI (1873)
  5. L'illustration, La première machine à calculer, juin 1908
  6. Wikisource: Lettre dédicatoire à Monseigneur le Chancelier La Machine d’arithmétique, Blaise Pascal
  7. Cette machine est appelée machine tardive. Nathalie Vidal, Dominique Vogt, p. 14 (2011)
  8. en 1649, pendant la régence de sa mère Anne d’Autriche.
  9. L'exclusivité se portait sur tout type de machine à calculer, pas seulement la pascaline.
  10. Wikisource : Privilège du Roi, pour la Machine Arithmétique La Machine d’arithmétique, Blaise Pascal
  11. voir explication dans le paragraphe Seule machine à calculer opérationnelle au XVIIe siècle de cet article
  12. « Paradoxalement, le mécanisme de la machine de Pascal est plus proche du mécanisme du moulin à eau que du mouvement d'horlogerie. Soumis aux mouvements brusques et irréguliers de la main de l'opérateur, il se rapproche des machines de force ». Jean Marguin, p. 41 (1994)
  13. L'intersection de deux tubes cylindriques non parallèle se fait théoriquement en un point
  14. Jean Marguin, p. 46 (1994)
  15. Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées Avis
  16. Le microprocesseur fut inventé par serendipité pendant le développement d'une calculatrice pour la firme Japonaise Busicom
  17. L'invention accidentelle du microprocesseur en 1971 fut rapidement suivie par le premier PC en 1975
  18. (en) «...in less than two years he had sketched out many of the salient features of the modern computer. A crucial step was the adoption of a punched card system derived from the Jacquard loom », Anthony Hyman, Charles Babbage, pioneer of the computer, 1982
  19. « La machine d'arithmétique fait des effets qui approchent plus de la pensée que tout ce que font les animaux ; mais elle ne fait rien qui puisse faire dire qu'elle a de la volonté, comme les animaux. », Blaise Pascal, Pensées, Pensées sur Gallica
  20. Jekuthiel Ginsburg, p. 315-321 (2003) Article écrit par Leland Locke pour Scripta Mathematica en juin 1933
  21. description de la machine du docteur Roth

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